le racisme n'a plus existé

“Moi j’étais mariée avec un italien – je suis d’origine italienne. Ça fait soixante ans, juste, que je suis là. Tous mes enfants sont français mais moi je suis restée italienne. A l’époque ils étaient racistes, les personnes. On était les cingala, on était les spaghettis, des ritals, des tout ce que vous voulez… Mon papa m’a fait un… comment on dit… il m’a éduquée, donc, pas du tout raciste, et à six ans et demi, je ne connaissais pas du tout les personnes à teinte noire. Je suis arrivée en Afrique italienne, c’était l’Erythrée, maintenant c’est l’Ethiopie, je crois, ou c’est l’inverse, je sais pas... Mon papa était géomètre, il construisait des routes. On habitait à quinze kilomètres d’une ville, on était presque en pleine brousse, et comme j’étais un peu garçon manqué, mon papa quand je suis arrivée là-bas il m’a dit : « Écoute, ce jeune homme » – il avait vingt ans, il s’appelait Asfa, je me souviens pas… – il m’avait dit « Ce jeune homme-là viendra avec toi parce que tu vas toujours dans les endroits où tu peux te faire du mal. » Donc il me présente son grand jeune homme, moi je le regarde de haut en bas, je dis : « Non, je veux pas ce monsieur avec moi. » Il me dit « Pourquoi ? » Je dis « Il est noir et il est sale… » Dans ma tête j’avais jamais dit. J’ai pris deux raclées, de mon papa. Il a pris un mouchoir blanc, il a piqué mon doigt et le sien, il a fait comme ça. Après il a enroulé le mouchoir et il m’a dit : « Maintenant tu vas me dire lequel c’est ton sang et le sien. » Et c’était fini. Pour moi, le racisme n’a plus existé, et il m’a dit simplement : « Les gens, il faut les fréquenter pour les connaître, et jamais les juger. » J’avais six ans et demi. Ça c’est une histoire qui est vraiment vraie.”

Mireille du magasin pour rien de Mulhouse, qu'il est émouvant d'écouter raconter son histoire de vive voix et de vif accent dans « Les pieds sur terre ».

P. S. 7.02.11:  motivé par l'intérêt et les relais de Kozlika, Franck Paul et Gilda pour ce billet, j'ai réussi – grande première – à surmonter les embarras techniques qui m'avaient empêché de donner cette histoire à entendre sur cette page. Le voici dans une version un peu plus longue par le début :