vendredi 14 décembre 2007

Stellet Licht (Lumière silencieuse)

Si grande est la beauté, la réussite de Lumière silencieuse (Stellet Licht), le film de Carlos Reygadas en salle depuis le 5 décembre, que je crains de ne pas réussir à les dire en quelques minutes, à lui rendre justice. C'est un film bressonnien et straub&huilletien (je pense à Sicilia!, à "l'homme dans le vallon") mais avec une lumière, une couleur, une volupté par surcroît. Un cinéma de la maîtrise - où chaque plan, chaque mouvement est composé sans rien laisser au hasard, avec une retenue, un dépouillement qui décuple chaque effet de montage, de mise en scène, de dialogue, chaque accent. Un travail de l'image - vidéo?! - qui vaut l'oeuvre d'un peintre. Un cinéma de la présence, au monde, aux êtres, de chair et de langage. Un bonheur pour l'oeil, et une expérience intérieure : l'art. J'en suis sorti heureux, en effet, étonnamment (car le grand bonheur ne va probablement pas sans surprise) ; rasséréné de me voir ainsi rappeler, dans le sombre décembre et le dégoût de la vie sociale (le quotidien de fatigue, de mesquinerie, d'égoïsme, de violence des gens, le nihilisme de la société-de-consommation-du-spectacle), quelles vérités l'homme pouvait atteindre, en ses oeuvres.

Dans un programme télé d'une chaîne improbable, j'avais trouvé du plus élémentaire bon sens l'objection faite par Monique Canto-Sperber à l'auteure d'un Eloge de l'adultère : l'aporie majeure, rappelait-elle avec un accent de vécu extrêmement touchant, de cette gentille petite rhétorique où tout est bien qui finit simple, c'est la souffrance – ce reste qu'un libertinage conséquent ne saurait ignorer, même si tout passe.
C'est à ce dilemme que s'attelle Carlos Reygadas dans Lumière silencieuse.

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