dimanche 19 juin 2011

Ernaux, La honte

« Il me semble que je cherche toujours à écrire dans cette langue matérielle d’alors et non avec des mots et une syntaxe qui ne me sont pas venus, qui ne me seraient pas venus alors. Je ne connaîtrai jamais l’enchantement des métaphores, la jubilation du style. »
Annie Ernaux, La honte (Gallimard, 1997, pp. 73-74)

Dans le TGV qui ce dimanche matin me fait remonter à l’envers vers l’aval de la Loire, la puissance de l’écriture élémentaire d’Annie Ernaux ne laisse pas de m’étonner. Tu crois qu’il n’y a rien là – que les anecdotes d’une mémoire individuelle. Il n’y a rien – qu’un récit, qu’un effort sans complaisance pour se rappeler et énoncer des faits, et les placer devant la conscience, à l’envers, dans un train. Rien à part tout ce qui dans bien des vies n’est pas vraiment dit ni clairement regardé. 
C’est tout.

« Ici rien ne se pense, tout s’accomplit. » (p. 63)

En lisant je pense aux points communs entre Annie Ernaux et notre estimée Samantditraverser des mondes, comme elle dit, changer de milieu en devenant prof de français.

« J’éprouve un sentiment d’avenir. » (p. 54)
« La vie te dressera ! » (p. 65)

Ecrire pour accommoder le flou de la transformation – impérativement faire le point. C’est peut-être parce qu’elles ont dix-sept ans d’écart que l’une est écrivain, l’autre blogueuse – Annie Ernaux reçoit le prix Renaudot pour La place à 43 ans, âge auquel Samantdi entame Vie commune (qui a eu sept ans le 13 juin).

« L’expression “le rideau de fer” m’a remise dans la classe de l’école privée, quand la maîtresse demandait qu’on dise la dizaine de chapelets pour les chrétiens qui étaient derrière et que je voyais une immense muraille métallique contre laquelle se jetaient des hommes et des femmes. » (p. 35)

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