vendredi 3 décembre 2010

empreinte de lectures

Voici un exercice que je tiens de Samantdi (qui le tient de etc.) et qui tombe très bien puisque c'est une question qu'il m'arrive de poser aux gens quand je suis (désespérément) en quête de lectures prégnantes ou de grands livres à côté desquels je serais passé (à l'usage, évidemment, on s'aperçoit que les rencontres avec les livres sont des rencontres, tributaires de l'histoire de chacun et du moment opportun, et que tel chef d'œuvre qui a changé la vie de Gertrude vous laisse oui certes indifférent...).
Quinze minutes pour dresser la liste de quinze titres qui m'ont marqué.

Jean Giono, Que ma joie demeure.
Stendhal, Le rouge et le noir : vacances de la Toussaint, à l'adolescence, captivé comme jamais.
Georges Bataille, L'Impossible, L'expérience intérieure.
Victor Hugo, Les Misérables, découverte tardive, il y a deux ans, grâce à l'impulsion de Samantdi (fort souvenir aussi des Travailleurs de la mer).
Julien Gracq, Le rivage des Syrtes, La presqu'île, œuvres complètes, théâtre exclu.
Pierre Bergounioux, Carnet de notes.
Philippe Jaccottet, Poèmes, Paysages avec figures absentes, ne pas savoir faire autre chose que de considérer le monde.
Yves Bonnefoy, L'improbable et autres essais. La présence.
Didier Eribon, Retour à Reims. L'émancipation.
Jean Genet, Journal du voleur, Poèmes.
Balzac, Illusions perdues. Steinbeck, Les raisins de la colère.
Hélène Berr, Journal. Etre jeune, frais, intelligent et croiser l'Histoire avec sa grande hâche. Alors écrire. Pas souvenir d'autres larmes versées en lisant.
Ramuz, Vie de Samuel Belet. La simplicité ? Peut-être aurais-je préféré naître suisse au début du vingtième siècle. La langue, bien sûr.
Michel Surya, De la domination. Petit opuscule qui exprime peut-être la quintessence du projet du monsieur de conjonction entre le souci stylistique d'énoncer et la pensée critique – poétique politique. Là pour toutes mes lectures politiques, critiques – considérer le monde de façon légèrement plus décidée.
Pierric Bailly, Polichinelle.

Quand je regarde cette liste dressée rapidement, rien ne me surprend vraiment, mais tout de même, il y a quelques petites choses frappantes.
Georges Bataille serait ma seule philosophie (Les confessions de Rousseau restées au bord peut-être à cause d'une vague et curieuse honte... Pas de rencontre décisive avec une pensée par concepts ? Ou pas du ressort de cette mémoire là, affective ?).
Je n'ai été marqué par aucune œuvre étrangère (L'impression d'oublier quelque chose. J'ai bien cherché quel Faulkner, quel Shakespeare ajouter, mais ce n'était pas la mémoire affective qui parlait. Expiation de Ian McEwan, par exemple, trop conventionnel pour que je l'affiche ? Les raisins de la colère, parce qu'il y avait assez de grands classiques ? Les émigrants de Sebald n'accrochent pas la mémoire ?).
Comment le petit Pierric Bailly a-t-il réussi à se frayer un chemin jusque sur cette liste somme toute assez banale de grands classiques (venant, à la surprise générale, coiffer sur le poteau  les Vies minuscules de Pierre Michon) ? Surprise que ce soit lui qui dans mon esprit représente l'expérience littéraire, linguistique souvent forte, la licence stylistique qui caractérisent le catalogue des éditions POL. Peut-être parce que c'est une histoire du 2-5.
Car pour l'imaginaire, je constate que ce qui me marque, affectivement, c'est, bien plus que des villes, de la fiction des champs...

La coutume veut qu'on passe le relais – à qui veut et passerait par ici – vous autres. Toujours curieux de savoir.

P. S. : j'ai oublié la Correspondance de Flaubert, temps que je remette le nez dedans. Et je constate à la lecture, maintenant, de la liste de Samantdi, que la mienne ne compte qu'une femme – pas trouvé quel titre pour Duras, au point de douter !... (Peut-être Ecrire, Outside...).

5 commentaires:

  1. Suis en train de me dire que si me prête à l'exercice plusieurs fois sur une période assez brêve donnée j'aurais sans doute des résultats fort différents selon force et moral du moment.

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  2. Photographie à l'instant t, oui, nécessairement, mais pour une lectrice dans ton genre voilà qui ne m'étonne pas (pensais même que tu avais déjà dû faire ce genre de listes à maintes reprises).

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  3. Et maintenant, je ne peux m'empêcher de rebondir sur ta propre liste :-)


    Jean Giono: je crois que je n'ai vraiment aimé de lui que son Roi sans divertissement, l'année où j'ai dû donner mon cours de TL. Je pense à lui chaque fois que le ciel est "noir de neige", je pense à notre envie de chaleur de troupeau. Je crois bien que ce roman m'a imprégnée des pieds à la tête...

    Stendhal, Le rouge et le noir : captivée moi aussi, mais je crois que je n'étais déjà plus adolescente, en première année de fac. Chaque année j'en étudie des extraits avec mes élèves.

    Georges Bataille, Troublant, et nécessaire d'être troublée.


    Victor Hugo, Les Misérables, découverte tardive, il y a deux ans, grâce à l'impulsion de Samantdi (fort souvenir aussi des Travailleurs de la mer).
    Oui, les Misérables, à faire lire relire, étudier... LE livre. se méfier des gens qui n'aiment pas Victor Hugo.

    Julien Gracq, lu un peu, avec fascination mais vite ennuyée, aussi.

    Pierre Bergounioux, grâce à toi !

    Philippe Jaccottet : me reste inconnu

    Yves Bonnefoy, un grand grand bonheur de lecture, lecture vivante en moi.

    Didier Eribon, Retour à Reims. L'émancipation. Du bonheur de partager avec un cyber-fils.

    Jean Genet, je ne connais pas bien, je regarde de loin, pas très envie de m'approcher.

    Balzac, Illusions perdues. Vive les histoires !

    Steinbeck, Les raisins de la colère. Trop tristoune, je n'aime pas bien. Je l'ai lu à l'adolescence, j'en garde un souvenir de désespoir.


    Hélène Berr
    Ramuz,
    Michel Surya,
    Pierric Bailly.
    Tous ceux-là, je ne les connais pas...

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  4. "La vie matérielle". De plus en plus. Je ne sais pas vous.

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  5. Pour autant que je me souvienne, je n'ai pas lu La vie matérielle – alors merci !

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